Le centre de Minnie’s Hope, fièrement enraciné dans sa communauté

Au cours des années, le modèle de la pédiatrie sociale en communauté s’est répandu partout à travers la province. De fil en aiguille, ces centres ont permis d’offrir une lueur d’espoir aux enfants et familles issus de situations vulnérables, agissant comme lieux d’accueil et de réconfort. Au Nord, le centre Minnie’s Hope propage cette bienveillance au sein des communautés cris et inuites de Whapmagoostui et de Kuujjuarapik.

Nous avons eu le privilège de nous entretenir avec Marianne Martin, directrice, et Johanne Morel, pédiatre, afin d’en apprendre davantage sur leur quotidien dans ce coin du Nunavik.

Crédit photo : CPSC Minnie’s Hope
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Le centre de pédiatrie sociale en communauté Minnie’s Hope mène une mission particulière : proposer à sa clientèle une approche dans le respect des valeurs et philosophies traditionnelles aux deux cultures qu’il rassemble. Situé à Whapmagoostui, signifiant le lieu du béluga en cri, le centre dessert également la population de sa communauté sœur à Kuujjuarapik, soit petite rivière en inuktitut.

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Toutes les voix comptent

Avec son équipe multidisciplinaire et multiculturelle, Minnie’s Hope s’assure de considérer l’enfant dans son entièreté : sa famille, sa culture, sa langue et les coutumes de sa communauté. Rien n’est laissé de côté. « On prend le temps d’inclure tous ces éléments dans la prise en charge, on veut que les familles se sentent à l’aise. On offre un environnement sans jugement, comme le veut le modèle du Dr Julien. Mais on pousse le tout encore plus loin », nous dit Marianne.

Concrètement, comment cela se traduit-il ? En centralisant les voix autochtones au cœur de la discussion, les mettant ainsi sur un pied d’égalité avec les composantes sociales et médicales du centre. Johanne nous explique que cette approche globale est davantage conforme aux philosophies traditionnelles cries et inuites : « nous prenons plus de temps avec les familles et nous avons une plus grande variété de traitements possibles. Par exemple, nous offrons de la psychothérapie telle que vous la connaissez, mais nous avons aussi de l’art-thérapie et de la thérapie par le jeu de sable[1] ». Pour Marianne, il ne fait aucun doute que cette manière d’aborder la pédiatrie fonctionne : « d’emblée, ça rejoint beaucoup plus nos familles et nos employés. Johanne apporte son expertise médicale et nos associés cliniques apportent à la discussion leur sagesse, leurs connaissances, leur culture. Cette combinaison fait notre force. C’est tout aussi précieux et important ».

Deux cultures unies

Permettant aux enfants et familles cries et inuites de se rassembler en un seul lieu, le centre de Minnie’s Hope foisonne de belles rencontres. Tous sont les bienvenus, peu importe la culture d’appartenance. « Prenez notre groupe de jeu. Chaque semaine, des enfants cris, inuit et métisses se retrouvent, simplement pour jouer et créer des liens. Comme nos accompagnateur et accompagnatrices, qui sont aussi issus de ces cultures. La langue n’est pas une barrière chez nous », affirme Marianne, fière de son équipe. Lorsque vient le temps de faire des activités, ce n’est pas la diversité qui manque : pêche sur glace, cueillette de baies, construction d’igloos, fabrication de collets pour petits gibiers, les enfants ont la chance de célébrer leurs pratiques culturelles au gré des saisons. Mais l’évènement le plus marquant de l’année ? La cérémonie de la première sortie.

Lors de ce traditionnel rite de passage cri, les familles se réunissent pour marquer le moment où les jeunes enfants mettent les pieds à l’extérieur du tipi pour la première fois. « Cela fait maintenant 5 ans que Minnie’s Hope organise cette cérémonie, le 21 juin, lors de la Journée nationale des peuples autochtones. Certaines familles que nous soutenons n’ont pas les ressources pour s’en occuper par elles-mêmes : ça demande beaucoup de temps, de soutien et de préparatifs. Et la construction du tipi, ça peut être très couteux. Alors, nous nous en chargeons pour la communauté », témoignent Johanne et Marianne avec émotion.

De l’émotion, ce n’est pas cela qui manque. Les aînés, en gardiens du savoir, transmettent leur sagesse et leurs connaissances aux familles, en prévision de la cérémonie de la première sortie. Rien n’est laissé au hasard : on apprend comment préparer le tipi pour la tenue de ce bel évènement. Puis, le jour venu, les enfants revêtent des habits traditionnels et s’aventurent à l’extérieur du tipi, où ils et elles sont accueilli·es par leur famille et les membres de leur communauté, réunis au soleil levant. En discutant avec Marianne et Johanne, il est évident qu’il s’agit d’une journée qui touche les cordes sensibles pour beaucoup de familles : « il y a un batteur traditionnel qui tambourine lorsque l’enfant sort du tipi. C’est un évènement qui symbolise le fait que l’enfant quitte la protection du cocon familial et prend maintenant sa place au sein de notre communauté ».

 

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De la passion au rendez-vous

Portant plusieurs chapeaux à l’intérieur même de Minnie’s Hope, Marianne est connectée à la communauté à bien des égards. « Aujourd’hui, j’avais le rôle de conductrice pour les enfants du groupe de jeu! » lance-t-elle en riant. Mère et grand-mère d’enfants et de petits-enfants cris et inuit, Marianne a une vision qui lui est propre : « je ne suis pas autochtone, mais j’ai beaucoup appris des peuples cris et inuit. J’ai le privilège de baigner dans ces deux cultures et je ne cesserai jamais d’apprendre ». Précédemment ambulancière puis directrice de la Protection de l’enfance et de la jeunesse pour Inuulitsivik, la passion de Marianne pour sa vocation se fait bien sentir. S’étant impliquée auprès de Minnie’s Hope comme bénévole lors de son ouverture en 2014, Marianne en est maintenant directrice depuis 2017. Un parcours riche pour celle qui habite Whapmagoostui depuis maintenant 37 ans. « Un parcours rendu riche par les gens qui m’entourent », tient-elle à mentionner.

Quant à Johanne, son chemin professionnel est aussi des plus impressionnant : « j’ai débuté ma carrière en tant que médecin généraliste à Chisasibi. Je suis tombée amoureuse de la région ! J’ai été accueillie à bras ouverts par les Cris, qui m’ont offert toute leur confiance. Je ressens une éternelle gratitude pour eux » nous confie-t-elle, émue. Décidant de se spécialiser en pédiatrie, Johanne pratique au Nunavik depuis les trente dernières années. Elle n’a toutefois pu ignorer les différences culturelles entre la médecine occidentale et les réalités de la communauté. « J’avais l’impression de n’apporter que des solutions temporaires ; c’est en parlant avec les gens autour de moi qu’est née l’idée d’un centre de pédiatrie sociale »

Une vision pour le futur

Cette douce complicité qui émane de ces deux femmes, elles la doivent à Minnie’s Hope : « c’est un privilège de travailler avec Marianne, avec toute l’équipe. Je suis choyée, nous assure Johanne. Comme notre approche est variée et holistique, on sent réellement que les familles sont satisfaites de ce que nous avons à leur offrir ».

Que souhaitent-elles, pour le futur de Minnie’s Hope ? « Un plus grand bâtiment! » s’exclament-elles en chœur. « Nous voulons à la fois rester tels que nous sommes et grandir. On veut s’assurer que notre programme demeure respectueux et réponde à un réel besoin de la communauté. On veut continuer à être sensible et bienveillant, de s’assurer que nos programmes soient conçus de manière à respecter les deux cultures », nous dit Marianne sur le mot de la fin.

 

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Des histoires comme celles de Marianne, Johanne et du centre Minnie’s Hope alimentent notre volonté de continuer à déployer la mission de la Fondation Dr Julien et le mouvement de la pédiatrie sociale à travers tout le Québec. Les communautés de Whapmagoostui et de Kuujjuaraapik ont de quoi être fières de leur héritage et nous les remercions sincèrement pour leur partage.

Grâce au soutien de la communauté, de nos partenaires, de nos donateurs et de nos bénévoles, nous pourrons continuer de soutenir des centres tels que Minnie’s Hope, afin qu’ils puissent à leur tour continuer d’être des phares pour les enfants et les familles issus des milieux plus vulnérables.

Merci de nous aider à bâtir, ensemble, une communauté solide, pour que tous les enfants puissent grandir en santé et atteindre leur plein potentiel.

Pour faire un don et ainsi contribuez à soutenir des activités de Minnie’s Hope, c’est par ici

 

 

[1] Destinée pour tous les âges, la thérapie par le jeu de sable est une forme expressive de thérapie qui consiste à utiliser un bac de sable, avec à disposition divers objets, pour que le patient puisse laisser libre cours à son imagination La thérapie par le jeu de sable – Sandplay Canada

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